1916
Le 1er janvier 1916, ordre est donné
d'éteindre les lumières à la tombée du jour. - Impôt
sur les chiens, ce qui amène la destruction de 350 chiens par les habitants.
Le18 janvier, les allemands sonnent les cloches, ils disent avoir pris
Cettigné. À la recherche des fils télégraphiques,
des soldats démontent les autels et le dallage de l'église, et
fouillent les sous-sols en vain.
Un groupe d'aviateur arrive dans le village, ils vont installer quatre hangars
près de la gare. En février, les allemands annoncent qu'ils
vont faire quelque chose qui va étonner le monde, prendre Verdun, puis
trois jours après, Paris.
En mars, les femmes et les enfants doivent
aller travailler dans les champs. Les soldats nourris avec des confitures crient
" " marmelade " en passant devant les officiers qu'ils ne saluent
plus.
En avril, obligation de mettre les montres et pendules à l'heure
allemande. L'achat de la " gazette des Ardennes ", journal rédigé
par des allemands en langue française est obligatoire, un numéro
pour deux maisons, la commune paiera l'abonnement qui est de 120 francs par
mois. Le 24 avril on fait préparer des logements pour quarante évacués
de Lille, hommes et femmes,. Le 29 avril, tous les permissionnaires allemands
sont rappelés. On recherche des espions anglais qui ont dû avoir
été amenés par des avions. Un de nos voisins dont le jardinier
avait dans les mosaïques de son jardin écrit " qui vivra verra
", est puni d'une amende de 100 marks.
Le 19 mai, une nouvelle contribution de guerre est imposée à
la commune, cette contribution payable en billets de banque française,
où bons de ville, sera pour la région de
150 millions.
Les allemands ramassent les vieilles cordes, les bouchons, la laine et comptent
les poules. Un avion laisse tomber quelques numéros de la " Voix
du pays ", ramassés malgré les gendarmes. Le 29 mai,
arrivent à Quéant une trentaine de lillois qui, ayant refusé
de travailler dans les tranchés à Moyenville, sont privés
de vivres. Les habitants n'auront plus que 300 g de viande par quinzaine, puis
250, et à partir du 26 juin ni viande ni beurre. Les jeunes gens reçoivent
l'ordre d'aller à la messe le dimanche, messe dite par des prêtres
allemands. L' abbé Fromont, curé du
village, malade, ne pouvait plus exercer son ministère depuis 1915.
Le 23 juin, le bruit du tir ininterrompu des canons entre Albert et Péronne
annonce le commencement de l'attaque de la Somme. Le 25 juin, un avion
anglais survole le champ d'aviation. Le 26, l'alarme est donnée, toutes
les troupes partent au front ; de l'artillerie et des fantassins reviennent
de Verdun.
Le 2 juillet, deux bombes tombent sur la gare ; les habitants, entre
Albert et Bapaume, abandonnent les villages. Les gendarmes ramassent les cahiers
des enfants dans les écoles, ils font récolter aux femmes les
orties et les limaçons.
Le 28 juillet, il n'y a plus à Bapaume que 500 habitants dans
les caves ; jour et nuit passent des troupes dans de grands camions: à
la gare passent des trains de blessés.
Le 1 août, à 11 heures du matin, vingt-quatre bombes tombent
sur le champ d'aviation, près de la gare, incendiant les hangars, détruisant
le matériel. Parmi les victimes se trouva malheureusement un jeune enfant,
Louis Coupé, qui avec ses camarades, travaillait par ordre dans les champs.
Les hommes ayant, à la suite de cet accident, refusé de rester
dans les champs à l'approche des avions, la commune fut menacée
d'être privée de vivre pendant quinze jours si ce refus était
maintenu. La culture des terres fut abandonnée par les allemands aussitôt
la récolte terminée. Le 10 août, les environs de
Bapaume sont dépeuplés. Les grosses pièces allemandes reculent
à Frémicourt et les champs d'aviation se multiplient autour du
village de Quéant.300 officiers et 6000 soldats logent maintenant dans
le village.
Le 20 septembre, le mobilier de l'église est retirée pour
permettre d'y loger les petits blessés; les grands blessés sont
installés dans les écoles et la mairie. Les offices se font dans
une grange.
Les russes construisent une voie de chemin de fer reliant Vaulx et Noreuil à
la gare de Quéant. Le 3 octobre on commence l'établissement
d'une ligne de tranchées derrière la gare, route de Buissy, qui
ira ensuite vers Pronville. Des civils allemands, hommes et femmes, viennent
y travailler avec des prisonniers russes, au nombre de 2000.
Le 5 octobre, il faut afficher aux portes des maisons les noms et âges
des occupants. On distribue des cartes d'identité. Le 6 octobre,
les parents ayant des enfants au-dessous de 14 ans, sont prévenus d'avoir
à évacuer le village le 10 octobre. Le 10 octobre, on commence
à miner l'église, les puits, les carrefour des routes, la cheminée
et le four à chaux de la fabrique, on recherche les souterrains qui ont
été connus par un ouvrage trouvé dans une maison du pays.
Le 12 au matin on s'aperçoit de la disparition pendant la nuit
ldu bois d'Hénin et de celui de la route de Buissy. Toutes les colonnes
de ravitaillement reculent, laissant la place aux troupes du front. Le 28
octobre fut le jour de la plus violente canonnade. Bullecourt a été
évacué. Le 24, les habitants sont vaccinés
contre le typhus . Le 25, le parc du château est relié par une
ligne de chemin de fer avec la gare, on va y installer un canon de 380 dont
le montage durera quatre mois, il, il devra tirer à 40 km.
Le 28 octobre, le village de Bihucourt est évacuée. On
voit passer des chariots chargés de meubles enlevés dans les maisons
abandonnées. Les hommes de plus de quarante-cinq ans vont travailler
sur les routes, dans les villages on forme des équipes d'hommes devant
aller travailler au front. On doit balayer les rues deux fois par jour.
Le 10 novembre passent 104 prisonniers anglais. Sur 1500 poules déclarées
précédemment les gendarmes en retrouvent 180.15 novembre,
un premier départ d'habitants de Pronville a lieu. Par suite du manque
de chevaux, les prisonniers russes sont attelés à des tombereaux
pour le transport des bois et fils de fer aux tranchés.300 prisonniers
anglais vont travailler à la gare de Noreuil. Le séjour des troupes
est de huit jours au front. On s'occupe du déménagement du ravitaillement
de la fabrique de sucre, il faudra cinquante wagons environ. Le 1 décembre,
arrive la grosse pièce qui va être installée dans le parc
du château. Elle tirera dit-on à 70 km. En bordure des routes,
le long des crêtes on creuse des petits caves pour y mettre les munitions.
200 prisonniers français passent allant à Noreuil ; quelques uns
ont le nouveau casque, leur moral paraît excellent.
Le 8 décembre on affiche une dépêche de l'empereur
demandant la paix pour Noël. Le 17 décembre un nouveau corps d'armée
impose au village une contribution de guerre de 53.000 marks, qui ne fut d'ailleurs
pas payée.